Dominique Resch, Interview
Dominique Resch, Interview – pour la sortie de son livre : Le plus beau métier du monde.
- J.D, Dominique Resch, bonjour et bienvenue sur Clicinfospectacles.com, tout d’abord pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
D.R, Je m’appelle Dominique Resch, ancien professeur de français et d’histoire-géo dans les quartiers nord de Marseille (pendant 30 ans !) et auteur de dix livres dont beaucoup traitent de mes élèves…
- J.D, Vous venez de publier aux Editions Vuibert « Le plus beau métier du monde », quel en a été l’origine ?
D.R, L’envie de raconter en images les situations les plus drôles, les plus tristes et aussi les plus rocambolesques que j’ai pu connaître dans mon lycée !
- J.D, Pourquoi ce titre de « Le plus beau métier du monde » ?
D.R, Parce que pour certains, il ne l’est plus du tout ! J’ai donc failli rajouter un point d’interrogation, d’ailleurs, à mon titre. Pour moi, en tout cas, dans le contexte actuel – on tue des profs ! -, ce métier reste tout de même le plus beau… quand bien même il deviendrait le plus dangereux. Le plaisir de la transmission du savoir… et la transmission du plaisir de savoir… Ces deux éléments essentiels, continuent, à mon sens, à rendre ce métier passionnant.
- J.D, Pour vous raconter, pour les raconter, était-ce une évidence de choisir le roman graphique ?
D.R, Le roman graphique permet de VOIR (évidemment) mes élèves. J’ai passé des années à les « raconter », aujourd’hui je les montre ! J’ai l’impression d’ouvrir la porte de ma classe et de faire entrer tout le monde…
- J.D, A travers des saynètes vous mettez à l’honneur vos élèves et cette vie de classe, tout est ce vrai ?
D.R, Tout est strictement vrai. Même si mon dessinateur ne peut s’empêcher de rajouter quelques bosses en plus ! Après tout, c’est un « roman » graphique. Donc, je le laisse faire… dans la mesure où il ne déforme pas ce que je dis. C’est essentiel pour moi.
- J.D, C’est un autre regard que vous donner à voir d’un lycée de banlieue ?
D.R, Ce n’est certes pas ce que l’on entend d’habitude. Il suffit de lire les journaux… Mais dans ces quartiers tout n’est pas non plus négatif. Loin de là ! Ma volonté est « aussi » de mettre l’accent sur ce qui va bien, sur ce qui est drôle… mais sans jamais verser dans l’angélisme. Je décris des situations parfois très dures… je pense notamment à mes élèves clandestins, venus de loin dans des conditions épouvantables, et qui n’ont pas une vie facile, une fois arrivés ici…
- J.D, Très peu de situation difficile, pourquoi ? ne les avez-vous pas vécues ou les avez-vous oubliés ?
D.R, Mon point de vue est d’abord « positif », c’est un axe choisi délibérément, comme je vous le disais. Mais attention : ça ne parait rien, mais certaines situations décrites sont, si on lit bien, extrêmement difficiles à vivre pour les intéressés. Des élèves qui demandent s’ils peuvent dormir à la cantine pour éviter de dormir sur les trottoirs de la ville… Je n’ai rien oublié, croyez-moi, de leurs problèmes insolubles ! Quitter son pays pour une vie meilleure et dormir, en décembre, entre deux poubelles, à des milliers de kilomètres de sa famille… Croyez-moi encore : ce n’est pas… facile !
- J.D, Après « Le Plus Métier du Monde », avez-vous changé votre manière de travailler ?
D.R, Dans « Le plus beau métier du monde », je décris ma façon de travailler, et de vivre tout cela. Ce n’est pas comme si j’avais lu le livre d’un autre sur le sujet… un livre qui aurait pu me faire changer ma manière de travailler, par exemple.
- J.D, Qu’aimeriez-vous que le lecteur retienne ?
D.R, Que l’école est encore le monde des « possibles »… qu’elle est encore debout, et au service des jeunes ! Qu’elle offre encore la possibilité de choisir sa vie. Ce qui n’est tout de même pas rien.
- J.D, Que sont-ils devenus tous ces jeunes que l’on découvre et à qui l’on s’attache tout le long du livre ?
D.R, La grande majorité travaille.
Ceux qui viennent du bout du monde sont particulièrement attachés à l’idée de réussir leur vie… de prendre une sorte de « revanche » sur la vie !
Certains s’en sortent moins bien, mais c’est une minorité.
- J.D, Aux dessins Eric Doxat, est ce difficile de laisser sa classe à quelqu’un autre ?
D.R, Je ne suis pas certain de comprendre votre question mais si c’est ce que je crois, je veux dire que cela a été un plaisir de lui remettre les clefs de ma classe !
- J.D, En vous remerciant, selon vous, comment sera l’école de demain en un mot ?
D.R, « Multiculturelle ! » (Et tant mieux…)
Je vous remercie beaucoup pour votre intérêt pour mon livre.
Propos recueillis par Jean Davy,
Dominique Resch, Interview
le 22/03/2024 pour infospectacles et clicinfospectacles